La belle aventure

Malika Moine, regard sur le monde

Elle dessine la ville. Celle d’ici et celle d’ailleurs. Et puis aussi les femmes et les hommes qui y déambulent. Elle met de la couleur à son dessin. Ou pas. Elle peint la mer aussi. Les bateaux et les ponts. Les poissons. Le bleu de la Méditerranée, le vert des plantes. Elle s’appelle Malika Moine. Son trait a quelque chose de naïf et précis à la fois. Ses propositions sont tendres et colorées, joyeuses et contemplatives. Vivantes.

Dessiner la vie

Malika Moine s’est mise au dessin tardivement – 24 ans – mais ensuite, elle ne s’est plus arrêtée. Elle dit qu’elle fait désormais des « reportages dessinés » et se présente comme une « reporter d’images », une belle manière de décrire son activité, qui consiste à témoigner du monde par le dessin

Aquarelle, encre de Chine, fusain, stylo Bic, elle varie les plaisirs avec une gourmandise évidente. Sa retranscription graphique de la ville est unique, ses crayons et ses pinceaux n’idéalisent pas, ils ne subliment rien, ils témoignent. C’est touchant, troublant. « Quand je dessine Marseille, il y a, en filigrane, toute l’histoire de cette ville, on devine les exils, les migrations. » Et c’est ce qui plaît à Malika : suggérer, donner à réfléchir, représenter les choses, les gens, les actions pour mieux les appréhender dans leurs multiples dimensions.

Le festif et le nécessaire

C’est lors d’un voyage au Guatemala que Malika choisit de délaisser la photographie pour essayer le dessin, une discipline qui demande plus de patience, mais qui respecte mieux l’image des gens. « En prenant des photos, j’avais l’impression de les voler. » Avec le dessin, la rencontre est moins abrupte, les choses se font en douceur, sur un temps plus long. Viennent alors les premiers carnets de voyage. Chine, Laos, Cuba, Brésil, Algérie, Maroc, Bulgarie, la dessinatrice découvre le monde et le restitue dans son langage graphique. Puis elle revient dans son Sud natal et s’attable aux bars, traîne dans les salles de concert et croque les scènes qui se déroulent devant ses yeux. La musique n’est jamais loin, elle fait partie de ses sujets de prédilection. Saxophone, trombone, percussions, accordéon… elle s’échappe de ses dessins. La dessinatrice s’immerge un temps dans le quotidien du Théâtre des Salins à Martigues, du Cirque Plume à Rezé, de Royal de Luxe au Havre, se plonge dans le festival Babel Med… Mais si le monde du spectacle et de la fête l’attire, elle est aussi très attachée aux sujets de société. En 1994, elle s’intéresse aux bidonvilles de Marseille, en 2015 à l’accueil des réfugiés à Vintimille et l’année suivante elle déploie cette thématique dans la vallée de la Roya. L’engagement par l’illustration, voilà son credo.

Des rencontres et des projets

Malika Moine fait partie de ces gens qui ont la chance de vivre de leur art. Depuis presque trente ans, on aime ses dessins, on les réclame. On apprécie aussi cet engagement, la manière si particulière qu’elle a de regarder les choses et les gens, avec tendresse et justesse. On l’invite à des conférences et des événements pour lui demander d’illustrer les propos tenus. En 2009, elle publie Tournée générale, 51 bars de Marseille. Suivront Croquis croquants, 52 restaurants de Marseille avec des recettes de chefs et Cœurs à l’ouvrage, 53 métiers, boutiques et ateliers à Marseille. En 2019, un nouvel ouvrage, édité en version bilingue, paraît : Balade à la Nouvelle-Orléans / Stomping’n Strolling in New Orleans.

Pour le magazine Marsactu, Malika s’invite dans la cuisine des gens et en tire de jolies petites chroniques culinaires. Sur le blog « Qui vive – éclats du quotidien », elle publie des croquis d’actualité. Des cartes postales illustrant Marseille et un calendrier annuel viennent compléter cette liste non-exhaustive des œuvres de l’artiste à qui l’Alcazar a consacré une exposition en février 2022. Son parcours étonnant, Malika Moine dit l’improviser au gré de ses envies et de ses engagements, et elle avoue se laisser porter par les rencontres et les hasards qui font foisonner les projets.

Malika nous conseille de nous intéresser à Touza dont la vie même est une aventure !