Quelle est l’origine du projet Mémoire de vie ?
L’humain m’a toujours beaucoup intéressée, que ce soit pendant mes études à Sciences Po Paris ou lors de mon master en techniques de l’image et du son à l’IUP Satis d’Aubagne. Je suis partie deux ans faire du bénévolat au Ghana et au Cambodge, j’ai envisagé un temps de devenir être reporter de guerre, ensuite j’ai fait un premier documentaire sur un musicien mauricien et le suivant sur des enfants des rues en Afrique du Sud. Étudiante, j’avais déjà dans l’idée de valoriser les personnes âgées, qui ne me semblaient pas perçues à leur juste valeur. Je me demandais aussi comment rendre esthétique la vieillesse. Cet attrait a sûrement un lien avec ma grand-mère qui s’est beaucoup occupée de moi. Quand j’ai été assez grande pour m’intéresser à sa vie, il était trop tard : une dégénérescence sénile lui faisait lentement perdre autonomie et mémoire. Je n’ai pas pu lui poser toutes les questions que j’aurais aimé lui poser. Mémoire de vie est la réponse que j’ai trouvée.
Pourquoi avoir choisi le format vidéo ?
C’est un média qui laisse de la place à la créativité et à l’esthétisme. C’est un outil vecteur d’échange aussi : on regarde, on écoute et ensuite on en discute ensemble. Ce que je propose, ce n’est ni un travail journalistique, ni un film témoignage, c’est un format très court, dynamique, qui se partage rapidement, qui se regarde facilement et qui permet de resserrer les liens entre générations. Un concentré de vie en quelque sorte. Une vidéo qui donne envie aux jeunes de poser des questions à leurs aînés. Ça peut aussi être une porte d’entrée vers une biographie écrite par exemple ou une recherche généalogique plus poussée.
Quelles formules proposes-tu ?
Je réalise des portraits vidéos mettant en scène une seule personne ou un couple, avec des images captées dans des lieux dans lesquels les gens se sentent bien. Je propose également des portraits uniquement sonores, qui peuvent durer un peu plus longtemps – autour de dix minutes. Les portraits vidéos sont plus courts.
Comment procèdes-tu ?
La première rencontre se fait chez les gens, sans matériel audiovisuel. Je veux m’imprégner de la personne, de sa maison, de la façon dont elle parle, dont elle marche. Puis j’organise une demi-journée d’entretien où je ne capte que le son avec un micro très discret. Les morceaux choisis de cet enregistrement constituent la voix off de la vidéo. Viennent ensuite deux ou trois demi-journées de tournage dans des lieux différents. Si je rencontre un problème technique, je ne refais pas la scène, on n’est pas au cinéma, je veux que ça reste spontané.
Comment convaincre un proche de se prêter à cet exercice ?
En expliquant que tout se passe comme dans une discussion amicale, on ne sent pas la présence de la caméra. Je crois qu’il faut être conscient aussi que malheureusement, passé un certain âge, les choses peuvent vite se dégrader. Il faut que l’échange entre les générations se fasse quand il est encore temps. Transmettre ses souvenirs pour ouvrir la discussion avec ses enfants ou petits-enfants, faire en sorte que le film devienne un vecteur d’échanges intergénérationnels, c’est pour moi un argument essentiel.
Qui fait appel à toi ?
Les gens qui veulent préserver la mémoire familiale. L’idée part en général d’une personne, qui va ensuite convaincre le reste de la famille, les cousins, les tantes, de réaliser une vidéo pour un grand-parent ou un parent. Parfois, une cagnotte est créée. C’est une idée de cadeau touchante pour un anniversaire de mariage par exemple.
Une autre belle initiative à nous communiquer ?
Je suis très admirative de l’action de l’association Ô Vivr qui propose aux personnes valides et avec un handicap de pratiquer un sport ensemble. Je trouve que c’est une très belle idée, qui fonctionne bien et qui mérite d’être mise en avant.
Pour découvrir le travail de Marie :